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Ce qui distingue ce livre, c’est sa présentation — l’une des premières, à notre connaissance — d’une subjectivité africaine. Par nature singulière, cette subjectivité est souvent accusée, au nom d’une certaine idée préconçue de la « conscience noire », d’adopter des traits « typiquement » occidentaux. Cette accusation reste pourtant à démontrer. Pourquoi la conscience africaine ne pourrait-elle pas traverser les mêmes tourments d’une conscience divisée ? Pourquoi le sujet africain ne serait-il pas, lui aussi, un sujet barré ? Nous soutenons au contraire que, plus que tout autre, peut-être en raison des souffrances liées aux dominations qu’il a subies, le sujet africain est particulièrement exposé au pathos existentiel que Mudimbe révèle. Pourquoi nous renvoie-t-on systématiquement à l’image stéréotypée d’un Africain simple, naturel, proche de la vie ? N’y a-t-il pas là les séquelles d’une idéologie raciste qui cantonne l’homme noir au stade préréflexif ? Il est vrai que le personnage central chez Mudimbe est névrotique, qu’il vit « l’écart », qu’il est un candidat à la schizophrénie, et qu’il en meurt. Mais cet exemple extrême illustre une réalité partagée par beaucoup d’intellectuels africains : la conscience douloureuse de leur non-appartenance, l’impossible adhésion à un lieu ou à une identité, faisant de L’Écart une œuvre exemplaire à cet égard.
Né le 8 décembre 1941 à Likasi (anciennement Jadotville) au Congo belge (aujourd’hui République démocratique du Congo), Valentin-Yves Mudimbe se destine très tôt à la prêtrise ; il fréquente des séminaires jusqu’à faire son noviciat dans un monastère bénédictin. En 1962, il abandonne la voie sacerdotale et s’inscrit à l’université en Belgique. Il est notamment l’élève du philosophe Franz Crahay. En 1970, il obtient un doctorat en lettres et en philosophie à l’Université de Louvain. De retour en Afrique, il enseigne à l’Université nationale du Zaïre. En 1979, comme beaucoup d’intellectuels zaïrois, il s’exile, d’abord en Afrique, en Europe ensuite, puis enfin aux Etats-Unis, où il s’installe durablement. Il devient professeur au Harverford College, à l’université Stanford, et à la Duke University.
Il est l’auteur d’une oeuvre conséquente, d’une rare diversité : à côté de ses recueils de poèmes, il a exprimé sa pensée dans une oeuvre romanesque importante. En 1973, paraît son premier roman, Entre les eaux, chez Présence Africaine, suivi du Bel immonde, en 1976, puis L’écart en 1979, chez le même éditeur. Mais sa pensée s’est surtout illustrée dans un livre majeur, The Invention of Africa, paru en 1988, traduit et republié chez Présence Africaine en 2021. Cet ouvrage indispensable pose la question de la signification d’un savoir à proprement parler africain et pointe les limites du regard occidental dans l’appréhension des réalités africaines.